Burn out : le piège de la suradaptation

Claire Lapeyronie Coach Burn Out et Reconversion Professionnelle

Il y a des comportements qui sauvent, qui apaisent, qui permettent de faire face. Pendant un temps. Puis, insidieusement, ces comportements se transforment en pièges. C’est le cas de la suradaptation. Elle commence par une bonne intention : répondre, s’ajuster, coopérer, faire plaisir. Et elle finit par une lente disparition de soi. La suradaptation n’est pas spectaculaire. Elle est douce, presque imperceptible. Mais elle coûte cher. Très cher. À force de répondre aux attentes des autres, on finit par ne plus entendre les siennes. Et ce silence intérieur, à long terme, abîme l’estime, l’énergie, la clarté.

A la fin de l’article, retrouvez 3 exercices à faire pour passer de l’envie au changement de vie !

L’origine d’un réflexe : plaire pour durer

La suradaptation est souvent un réflexe ancien, forgé dans l’enfance ou renforcé dans des environnements professionnels exigeants. Elle émerge là où l’on apprend qu’il faut faire plus pour être aimé, dire oui pour être reconnu, cacher ses besoins pour éviter le rejet. Elle s’insinue dès que l’on croit que sa valeur dépend du regard extérieur. Ce mécanisme est d’autant plus renforcé dans les cultures d’entreprise où la loyauté est survalorisée, où la polyvalence est érigée en modèle, où le « bon collaborateur » est celui qui ne pose pas de problème, qui dit oui sans délai, qui encaisse sans broncher.

L’art de s’oublier avec le sourire

La personne suradaptée n’est pas celle qui se plaint. C’est celle qui s’ajuste, sans bruit. Elle prend des dossiers supplémentaires, accepte les horaires décalés, répond le week-end, rassure tout le monde. Elle est flexible, malléable, rassurante. Une perle rare, souvent valorisée. Mais à l’intérieur, l’histoire est différente. Une colère sourde s’installe. Une fatigue profonde s’installe. Un sentiment d’injustice flotte, sans pouvoir être nommé. Car dire non, dans cet engrenage, semble impensable. La peur d’être perçu comme égoïste, de décevoir ou de perdre sa place est plus forte que l’élan de s’affirmer.

La perte progressive de repères

Le problème de la suradaptation, c’est qu’elle devient une posture automatique. On ne sait plus où sont ses propres limites. On ne sait plus ce que l’on veut vraiment. On dit oui par réflexe. On s’ajuste avant même que l’autre ne demande. On anticipe, on devance, on compense. Ce mode de fonctionnement épuise l’identité. On finit par ne plus savoir si ce que l’on fait, on le fait par choix ou par habitude. Par envie ou par obligation. La confusion s’installe. Et avec elle, un sentiment de perte. Perte d’autonomie, de clarté, de confiance. On vit en fonction de ce qui est attendu, et non de ce qui est aligné.

L’incompréhension des autres

Le plus grand paradoxe de la suradaptation, c’est qu’elle est rarement reconnue par les autres. Pire : elle est souvent exploitée. Non pas par malveillance, mais par ignorance. Celui ou celle qui s’adapte en permanence donne l’illusion que tout va bien. Qu’il ou elle est à l’aise avec ce rythme, ces responsabilités, ces ajustements. Et quand la personne finit par craquer, personne ne comprend. « Mais tu n’as jamais rien dit ! » – et c’est vrai. La suradaptation rend muet. Elle enferme dans une loyauté toxique, dans une volonté de préserver l’image, dans une incapacité à poser des mots sur ce qu’on vit. Ce silence, longtemps entretenu, finit par isoler.

Le piège de la reconnaissance différée

La personne suradaptée attend souvent une chose : qu’un jour, on reconnaisse son dévouement. Qu’un jour, on comprenne tout ce qu’elle a donné, tout ce qu’elle a accepté, tout ce qu’elle a sacrifié. Mais cette reconnaissance tarde. Et elle finit, souvent, par ne jamais venir. Car ce qui n’a pas été exprimé ne peut pas être entendu. Ce qui n’a pas été posé ne peut pas être respecté. Et plus la reconnaissance est absente, plus la suradaptation s’intensifie. C’est un cercle vicieux. On s’efface dans l’espoir d’exister. On en fait plus pour ne pas perdre ce qui manque déjà : une juste place.

Reprendre sa place n’est pas trahir

Sortir de la suradaptation, ce n’est pas devenir dur ou inflexible. Ce n’est pas rejeter les autres, ni nier l’importance du collectif. C’est simplement reconnaître que toute relation, qu’elle soit professionnelle ou personnelle, demande un équilibre. Et que ce qui est un don de soi, lorsqu’il est unilatéral, finit par devenir une perte de soi. Reprendre sa place, c’est apprendre à dire non. À poser un cadre. À affirmer ses besoins sans agressivité. C’est retrouver la solidité intérieure nécessaire pour exister pleinement, sans se plier systématiquement. Ce mouvement demande du courage. Mais il est libérateur.


PASSEZ DE L’ENVIE AU CHANGEMENT DE VIE
Prenez un moment pour vous, au calme, pour réfléchir à votre avenir

Pour sortir de l’engrenage de la suradaptation, il ne suffit pas d’en prendre conscience. Il faut créer de nouveaux repères, réapprendre à s’écouter et à se positionner. Ces trois exercices sont des points d’ancrage concrets pour entamer ce travail.

Exercice 1 : Le baromètre des décisions

Pendant une semaine, à chaque fois que vous dites "oui", notez-le dans un carnet. Juste après, demandez-vous : "Ai-je vraiment envie de dire oui ?" ou "Est-ce que je dis oui pour éviter un malaise ?" Cette prise de conscience simple permet de déceler vos automatismes. À la fin de la semaine, relisez et observez vos zones de surajustement.

Exercice 2 : Le « non » de confort

Choisissez une situation simple, peu risquée, dans laquelle vous avez tendance à dire oui par réflexe : un appel imprévu, une tâche supplémentaire, un service demandé. Et entraînez-vous à dire non. Sans justification excessive. Avec bienveillance, mais fermeté. Ce petit « non » est une victoire. Il marque un territoire intérieur. Il dit : « Je me respecte. »

Exercice 3 : La liste des permissions

Prenez une feuille blanche. Notez cette phrase en haut : « Je me donne la permission de… » et complétez-la avec au moins dix affirmations. Par exemple : « Je me donne la permission de ne pas répondre immédiatement », « … de ne pas être parfait », « … d’avoir des besoins différents », « … de dire non sans culpabilité ». Lisez cette liste chaque matin pendant dix jours. Elle agit comme un réencodage symbolique.

La suradaptation est un mécanisme de survie qui, à long terme, nous éloigne de nous-même. Il ne s’agit pas d’en faire le procès, mais d’en comprendre le prix. Et de retrouver, pas à pas, le droit d’être soi. Pleinement. Pas en fonction de ce que l’on attend. Mais en fonction de ce qui nous nourrit.

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